Tomson Highway, dramaturge, romancier et musicien de renom et membre de l’Ordre du Canada, sera conférencier en séance plénière
aux côtés du Dr Ariel Dempsey au Congrès international de soins palliatifs McGill qui aura lieu en octobre prochain.
Avec le titre «Le Sage, le Danseur et l’Idiot : Pallier l’incertitude. (dans lequel le sage est l’intelligence, le danseur est l’esprit et l’idiot est le corps d’une personne), les complexités et les défis de l’incertitude seront explorés à travers les perspectives uniques de la culture, la danse, la musique et la médecine autochtone.
Tomson Highway a été le récipiendaire de neuf degrés honoraires, ainsi que des honneurs équivalents du Conservatoire de musique de Toronto et de l’École nationale du théâtre (Montréal). En 1994, il a été nommé Membre de l’Ordre du Canada et en 2001, on lui a décerné le Prix national d’excellence autochtone dans la catégorie des arts et culture. Highway est considéré un des dramaturges les plus importants du Canada. Sa mémoire Permanent Astonishment a été le gagnant en 2021 du Prix Hilary Weston Writer’s Trust pour non-fiction. En 2022, Highway a donné des Conférences au collège Massey. Bien qu’il habite à Gatineau au Québec, Highways adore voyager à travers le monde et parler plusieurs langues.
Devon Phillips a interviewé Tomson Highway lorsqu’il était au Brésil.
Devon Phillips (DP)
Je suis très heureuse d’avoir l’opportunité de prendre contact avec vous. Je veux entendre parler de vos voyages. Comment trouvez-vous le Brésil?
Tomson Highway (TH)
J’adore voyager à travers le monde, vraiment. Je suis né en voyage. Si je ne voyage pas, je ne suis pas moi-même. C’est ma 12e fois à Rio. Je séjourne dans une chambre d’hôte ici à Rio et vous pouvez entendre l’océan. Une des raisons pour lesquelles je pars est d’aller me cacher pour que personne ne puisse me joindre et voilà tu m’as trouvé.
DP : Pourquoi Rio?
TH : Bien, j’adore les langues. J’aime apprendre le portugais, Brazilero. L’anglais n’est pas ma première langue. Ça m’a pris 15 ans au total pour apprendre l’anglais et un autre 15 ans pour apprendre le francais et encore un autre 15 ans pour apprendre l’italien, et ça continue. Maintenant, j’apprends le portugais, et à chaque fois que je m’arrête, j’essaie d’apprendre la base, la politesse comme Bonjour, and avez-vous bien dormi?
DP : Vous parlez plusieurs langues, mais j’assume que dans votre cœur, votre première langue est le cri.
TH : Absolument. Ma première langue est le cri. C’est une langue merveilleuse. C’est une langue qui rit. Lorsque tu le prononces pour la première fois, tu commences à rire immédiatement. Le cri est une langue de filou. La figure mythologique qui nous l’a apporté était un clown. Nous avons tous été touchés par le christianisme car nous vivons dans le monde occidentale, formé dans une tres large mesure par la théologie-mythologie. La leçon centrale est que nous sommes ici pour souffrir, que nous sommes là pour expier un crime que nous n’avons pas commis. Et, alors nous payons le prix pour cela. Il y a une histoire d’un jardin : Dieu a créé l’espèce humaine et a mis les humains dans un beau jardin et il nous a expulsés, et depuis nous vivons hors du jardin. Par ailleurs, dans la mythologie crie et dans la mythologie autochtone nord-américaine dans son ensemble, c’est l’inverse. La raison pour laquelle nous sommes ici sur la planète Terre est pour rire, passer un bon moment et profiter du jardin. Afin de dépasser l’idée que nous sommes toujours dans le jardin, nous devons dépasser la langue anglaise pour comprendre cette idée implicitement et explicitement. Il y a toute une histoire là-dedans, mais c’est essentiellement l’idée.
DP : Donc, j’assume que la joie provenant de la mythologie cri éclaire votre identité et le travail
que vous faites.
TH : Oui, beaucoup.
DP : Parlons de votre conférence en séance plenière ou vous allez traiter le thème de l’incertitude. Vous allez collaborer avec Ariel Dempsey. Vous avez tous les deux des pratiques artistiques. Vous contribuez votre formation en musique classique et toute votre expérience en tant que dramaturge et romancier et elle apporte son expérience en tant que danseuse et médecin. Quelles sont vos pensées sur cette collaboration?
TH : Ce sera une collaboration parfaite. La science et la musique sont étroitement reliées. J’ai rencontré des personnes qui sont de nature scientifique et qui sont aussi des musiciens et des artistes, mais c’est la première fois que je connais une personne qui est un médecin et un artiste
comme Ariel. Ça aide que mon jeune frère, le 11e de 12 enfants, était un danseur. Il expérimentait avec la chorégraphie à la fin de sa vie, il est mort jeune. Il m’avait demandé, en tant que pianiste et compositeur, de lui écrire une pièce de musique donc je me suis mis à la composition de la musique pour la danse. J’ai un rapport intime avec le monde de la danse – les termes et les mouvements et comment composer de la musique pour elle. Je me sens à l’aise avec cela. Mon frère est toujours présent pour moi; il est un rayon d’énergie ici même dans cette pièce. Dans la culture autochtone, il existe une expression : « il n’y a pas de mort, il y a seulement un départ ».
DP : Je ne veux pas révéler l’histoire de votre conférence en séance plenière, mais pour les personnes qui viendront, qu’aimeriez-vous leur
dévoiler concernant la force motrice de votre message?
TH : Je suis venu à la conclusion au fil des années que je suis aussi un médecin. Les médecins s’occupent des maladies. Ils s’occupent du corps humain après que la maladie s’est installée, quand il est trop tard. Les artistes sont à leur façon aussi des médecins. Ils s’occupent de l’esprit
humain en opposition au corps. Nous traitons de la réalité spirituelle de l’individu et de la société dont il est issu. Nous traitons l’entité avant que la maladie prenne le dessus. Nous sommes des guérisseurs. Nous guérissons l’esprit humain. Sans les symphonies de Beethoven, vous savez, le monde serait déprimant et nos esprits se ratatineraient, rétréciraient et mourraient. Cela inclut la littérature, la poésie et les arts visuels. Je crois sincèrement que les artistes sont aussi des guérisseurs, tout comme les médecins. Les médecins s’occupent du corps humain et les artistes, de l’esprit humain.
DP : Bien dit. J’ai bien hâte de voir vous et Ariel combiner vos pouvoirs incroyables artistiques et intellectuels pour créer une séance plenière mémorable. Tout cela en connaissant un peu sur vous, je crois que cela apportera beaucoup de joie et de guérison.
TH : J’espère parce que je vois à la communauté humaine comme un tout. Cela est le travail principal d’un artiste. Ça dépend de chacun, les artistes traitent plutôt avec des communautés spécifiques. Je suis plus impliqué : j’écris sur les autochtones. J’écris sur leurs problèmes, leur sens d’humour,
leurs chants, je les fais chanter, je leur donne de la musique. Il n’y rien de plus engageant qu’une communauté qui chante, qui laisse leur poumon respirer. Nous devons tous chanter. La mythologie chrétienne, qui se situe à l’autre extrémité du spectre, traite de Dieu. Mais dans ce système de pensée, il n’y avait qu’un seul dieu et il est un homme. Dans la mythologie autochtone c’est le contraire. Quand Christophe Colomb est arrivé en 1492, la première question que nous lui avons posée était « où est ta femme? ». Pourquoi êtes-vous venu seul? Où se trouve l’idée d’une divinité dans une forme femelle dans le christianisme? Nous arrivons à une époque où le Dieu male a une chance de détruire la planète, avec des crises écologiques, des déséquilibres environnementaux, des incendies de forêt, des inondations, et Dieu sait quoi d’autre. Afin de corriger ce déséquilibre, nous devons donner à la déesse, pour ainsi dire, sa place dans l’ordre des choses. Est-ce qu’on une réponse à cette question, où est la femme de Dieu? Bien, elle a toujours été présente. Dieu au ciel en tant que présence céleste retiré de la terre. La déesse est dans la terre. Elle est la mère. Et, nous devons prendre soin d’elle.
Je sais que j’ai eu une vie incroyable et je suis reconnaissant pour cela. J’ai des petits-enfants qui ont maintenant 12 et 10 ans. Quel genre de planète aurons-nous après que nous quitterons? Vous savez que ce n’est pas juste pour nous de l’avoir détruite. Nous voulons laisser une planète à la prochaine génération qui est habitable, avec un air respirable, une eau potable. C’est pourquoi nous sommes là pour redonner vie à cette idée.
DP : Est-ce que vous avez d’autres choses à transmettre aux personnes provenant de 65 pays, qui
viendront au Congrès?
TH : Ce sera un plaisir pour moi de les rencontrer. Oui, absolument. De pouvoir parler avec ces gens. Je parle de la musique de Brahms et Chopin. Je parle aussi plusieurs langues. Je parle facilement en francais. J’ai hâte d’accueillir tout le monde de Montréal. J’ai hâte d’accueillir tout le monde!
En 2022, j’étais un conférencier du collège Massey, et ils ont publié tous mes conférences dans un livre dont le titre est Laughing with the Trickster. Cette conférence va immensément aider les gens à rencontrer mes idées qui seront représentées en séance plenière le 16 octobre prochain.
Lien aux conférences du collège Massey de 2022, Laughing with the Trickster, par Tomson Highway:
https://www.cbc.ca/radiointeractives/ideas/cbc-massey-lectures-tomson-highway
Lien à la version du livre de Laughing with the Trickster.
Laughing with the Trickster – House of Anansi Press
Traduction par: Suzanne LeBlanc
Photographié par Sean Howard
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